Les vieux cépages Parisiens


    Quels sont-ils ? Existent-ils toujours ? Pas facile de répondre à ces 2 questions. Au travers de ces quelques lignes je souhaite vous apporter quelques éléments de réponses.

     Je vous ai souvent rapporté que la région parisienne était une ancienne région viticole et vinicole, sans aucun doute. La vigne et le vin y sont mentionnés depuis au moins le XIème siècle. Dans mon article sur ce que pourrait être l’histoire de notre chai du centre Abel l’Auvray, les moines des cordeliers cultivaient la vigne au-dessus dans les Martrais (quartier de Mantes la Jolie).

   Impossible de retrouver le nom des cépages de l’époque, seulement, il me fallut remonter le temps sur nous en cherchant un possible nom de cépages. Malheureusement je n’y suis pas parvenu. Alors, je me suis intéressé à une période plus récente où les livres, les publications et autres articles en chinant à droite à gauche sont plus accessibles. Maintenant il est aussi possible de naviguer sur internet où je n’y ai trouvé que quelques publications mais certaines intéressantes.

     La région parisienne a vu l’apogée de son vignoble, disons-le dans la deuxième partie du XIXème siècle, et au tout début du XXème siècle juste avant la Première Guerre mondiale. La région parisienne était à cette époque la première région viticole et vinicole de France. Il semblerait donc aisé de retrouver les cépages cultivés. Aussi étonnant que cela puisse paraître, non !

     À force d’obstination, j’ai réussi à capter quelques noms de cépages, le temps pour moi de creuser un peu. Il faut d’ailleurs tenir compte sur le fait que le vin était une boisson, je dirais pour vivre et de travail, non pas un produit de plaisir comme de nos jours. Peu importait le nom du cépage, du domaine ou de la qualité gustative du vin. Le raisin portait un nom qui était souvent, très local, qui variait d’un coin à un autre et qui, au fil du temps,  se voyait modifier également son orthographe. Il en était ainsi de tous les cépages qu’il soit blanc ou noir.

     Voici les noms de cépage que j’ai pu retrouver et à priori cultivés en région parisienne au cours des  XVIIIème,  XIXème et début du XXème siècles, juste avant les dégâts causés par le phylloxéras et l’urbanisation. C’est ainsi que des noms de cépage étaient utilisés aussi bien en raisin blanc que noir, seul la couleur du vin changeait ...

     Raisin blanc : CHASSELAS, MORILLON, MESLIER, GOUAIS, PINEAU BLANC, BLANCHET, ARBANE, FROMENTIN

     Raisin noir : PINEAU, MORILLON, SAMOIREAU, MADELAINE, PLAN DU ROI

     Pour le raisin blanc, le cépage le plus répandu fut assez facilement le CHASSELAS, plus particulièrement de Fontainebleau (ou Thomery). Pour ce CHASSELAS, il y aurait bien unanimité. C’est notre roi François 1er qui l’aurait fait planté pour développer le vignoble de la région parisienne, habitué à résider en pays de Loire dans les magnifiques châteaux, il semblerait logique qu’à l’époque, les vignerons aient utilisés leurs ceps blancs et noirs. Tout comme le bon vieux CHENIN qui à l’époque portait un autre nom, le PINEAU BLANC de Loire. Le CHENIN est mentionné depuis le Xème siècle en Anjou puis en Pays de Loire. Il est donc fort probable que lui aussi arriva en région parisienne.

     Pour revenir au CHASSELAS, d’autres sources mentionnent une importation du CHASSELAS de Turquie, Constantinople plus précisément, par un diplomate du roi François 1er.

     Il y en a d’autres comme l’ARBANE qui est réutilisé en champagne et aussi le MESLIER. Pour ce dernier,

    Il s’agirait d’un métissage entre deux cépages anciens, le CHENIN (toujours lui) et le GOUAIS, tous deux cultivés également en région parisienne. Pour le dernier blanc, je vous citerais le MORILLON blanc qui lui aussi était bien implanté en France depuis le Moyen-Âge.

    Pour le raisin noir, le cépage le plus répandu fut le PINEAU. Ce PINEAU devint le PINOT de nos jours, oui, il s’agit bien du même cépage, seulement son nom comme je vous l’ai signalé au-dessus changa au gré des régions et du temps. Non seulement son nom s’est transformé mais il se déclina en plusieurs variétés, elles sont nombreuses et pour arranger le tout, sur les deux couleurs blanc et noir, tout comme d’ailleurs pour les cépages MORILLON et GOUAIS qui existaient également en noir.

    Je vous ai souvent parlé du PINOT MEUNIER parisien pour avoir repéré dans notre Mantois des ceps à l’état « sauvage ». Et bien, c’est une de ces variétés qui a résisté aux phylloxéras entre autre. Je suis fier d’avoir fait des boutures qui rejoindront prochainement la vigne patrimoine sauvée par Michel de l’Abel-Lauvray. Pourquoi MEUNIER ? Tout simplement sur le duvet blanc qui ressemble à un dépôt de farine sur les jeunes feuilles de vigne en témoigne la photo.

       Meunier                                                         

    Quant au cépage MORILLON noir, il s’agit du MADELEINE noir de nos jours. Mais, le vrai cépage parisien, aujourd’hui disparu, est le SAMOIREAU ou PLAN DU ROI. Une fois de plus, c’est le roi François 1er qui fit planter massivement ce cépage. Sa trace fut perdu en Pays de Loire … certains écrits mentionnent sa mutation sur un autre cépage qui lui est bien connu, le COT.

     Maintenant à la question pourquoi ne retrouve-t-on pas d’historique de tous ces cépages, je n’ai pas trouvé de réponse. De mon point de vue, il est fort probable que l’intérêt de cette boisson pour la soif ait disparu avec les phylloxéras à la fin du XIXème siècle en premier élément de réponse et la Première Guerre mondiale qui a transformé notre société.

     Voilà, cette petite rétrospective de mes recherches en matière de vieux cépages parisiens est terminée. Je souhaite que de votre côté, vous fassiez de même et je suis impatient de voir mes boutures de PINOT MEUNIER se développer et je l’espère donner du raisin.

                                                                                       Stéphane Grandclément

Date de dernière mise à jour : 19/10/2023